[Dieudonné Danglet 2] La Peste blonde by Philippe Bouin

Auteur:Philippe Bouin [Bouin, Philippe]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman Historique
ISBN: 9782878585438
Éditeur: Vivianne Hamy
Publié: 2012-08-25T22:00:00+00:00

Si les yeux de la statue de la Sainte Vierge de l’église Saint-Séverin n’avaient pas été de pierre, ils se seraient probablement dilatés d’effarement.

Dans le double déambulatoire, fascinant de beauté, deux ecclésiastiques, côte à côte, semblaient prier à genoux devant la chapelle rayonnante où Elle recevait les vœux des éprouvés.

Mais pour un observateur avisé, deux particularités distinguaient leur présence du reste des paroissiens. La première, un tantet singulière, était que l’un portait la tenue des prêtres, et l’autre la robe des Dominicains. On pouvait, à juste titre, s’interroger sur la réunion peu banale d’un séculier et d’un régulier… La seconde concernait l’arrivée du moine, puisque nul ne l’avait vu franchir le porche, pas plus qu’une des portes latérales. Par quel miracle avait-il pénétré dans ces lieux ?

On aurait pu en ajouter une troisième, mais celle-là dépendait d’un autre sens que celui de la vue, il concernait l’ouïe… Car nos deux religieux, loin d’égrener leurs chapelets ou de communier dans la même foi, discutaient de sujets profanes. À voix basse, le prêtre demanda :

– Cette pénurie inquiète les instances supérieures ; ne pouvez-vous trouver un procédé de remplacement ? Y a-t-il d’autres moyens pour se procurer, comment l’appeler ? de la matière.

– Impossible, le plan de substitution a dû être abandonné, il présentait trop de risques.

– Lesquels, mon père ?

– Avec toutes les perruques qui ont été écoulées, on ne peut désormais savoir si celles que l’on « emprunte » sont bonnes ou mauvaises. Rien ne les différencie, nos amis pourraient, à ce jeu, en « ramener » une contaminée et mettre leur vie, et celle des nôtres, en danger.

– Évidemment, vu sous cet angle, nous butons dans un mur.

Un chrétien fit halte devant la statue de Marie, ils durent interrompre leur dialogue jusqu’à son départ. Le moine s’enquit :

– Sinon, avez-vous reçu des nouvelles ou de récentes instructions ?

– Oui, mon père. L’Espagne nous fait savoir qu’en raison de nos difficultés, nos chefs sont disposés à mettre le prix pour contourner les mesures prises par La Reynie. Personne ne s’attendait à ce qu’il réagisse aussi vite et aussi fortement. Le lieutenant de police nous a surpris. Paris n’est pas Londres.

– Quant à la Flandre, elle nous apprend que Rimbault a jugé plus prudent de lui acheminer directement sa marchandise par bateau.

– Excellente initiative ; par les temps qui courent, il n’ira pas se faire remarquer en chargeant ses barriques dans le port de Rouen. Un bateleur n’est pas un négociant, d’aucuns suspecteraient son trafic… Reste à savoir quand et comment elles nous parviendront.

Le prêtre fit un sourire :

– Peut-être plus tôt que vous ne l’espérez. Une parquette7 arrivera vendredi soir au port Saint-Nicolas. Si sa cargaison contient ce que nous attendons, vous pourrez reprendre aussitôt le travail.

– Mais comment cela se peut-il ? Les accès de la capitale sont bloqués.

– La flûte appartient à monsieur Boqueteau, vous fais-je un dessin ?

Le moine fit non de la tête en poursuivant :

– Saint-Nicolas, aux abords directs du Louvre… N’est-ce point dangereux ?

–

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